Rimbaud versos a la deriva

lunes, diciembre 09, 2013




"Ainsi, nous montrons d’abord comment expriment Baudelaire, Rimbaud et
Lautréamont par leur poésie

le culte du moi, le culte du Beau et le jeu de dépersonnalisation

et de pluralisation du moi."


"Comment Rimbaud, brillant élève ayant un goût immodéré pour le mouvement,
les escapades, les voyages, entreprend-il cette quête de soi, sinon par fugues?"


"Par les fugues, ce collégien tente de devenir auteur et acteur de sa propre vie.
Est-ce que « La vraie vie est absente », comme l’écrira Rimbaud dans Délires I ?
Ou est-elle ailleurs ? Le terme d’« ailleurs » précise le lieu imprécisément,

le lieu de nulle part

qui est à tous et à personne"


"enfuir de « la bouche d’ombre »"



"Je suis dépaysé, malade, furieux, bête, renversé ; j’espérais des bains de soleil,

des promenades infinies,

du repos, des voyages, des aventures, des bohémienneries [...] "


"...  parce que pour Rimbaud,

le départ est absolu,

c’est le seul moyen pour sa chasse spirituelle, comme le remarque
Stanislas Fumet, il n’est pas enfant terrible, mais celui qui envie de

« courir après les lueurs de l’enfance, après la matière diaphane des métaphores,
après les sensations de voiles levés « un à un » ».

Il refuse tout ce qui peut être perçu dans la durée, perçu par la vue, perçu par l’ouïe,

perçu par la sensation même d’exister. Il refuse « les arrêts de la vie »,
selon l’expression de Pierre Brunel."


"Dans l’article publié le 16 décembre 1910 dans le Mercure de France, Izambard
parle de son rôle à la fois « maternel » et « trop officieux Mentor » à l’égard de son
ancien élève :

« [...] pour la brutalité tyrannique de cette mère, brutalité maladroite aussi,
puisqu’elle précipita la révolte, jamais je n’ai exprimé devant son enfant,
même par des demi-mots, la réprobation soulevée en moi par cet autoritarisme
obtus. [...] Cette mère, [...] n’a jamais su quel auxiliaire elle trouvait en moi,
secours d’autant plus méritoire que je me contraignais pour « mentir »,
pour jouer sans me trahir ce rôle ingrat de médiateur. [...] Rimbaud grinçait
à mes semonces et murmurait, l’air mauvais, que j’étais « comme les autres »,
une énorme injure dans sa bouche. Certes, l’affection « maternelle » qu’il sentait
en moi, malgré la minime différence de nos âges, me le ramenait bientôt,
confiant et rasséréné ; n’empêche que ce fut après une sermonade plus forte,
et toujours au sujet de sa mère, qu’il cessa de m’écrire en mai 1871.
Ses impatiences du joug fatal lui firent prendre en grippe l’officieux Mentor,
le trop officieux Mentor que j’étais."


"d’autre part, à cause de l’affection maternelle impossible éprouvée en
Madame Rimbaud et de la brutalité tyrannique de celle-ci, ce rôle maternel
d’auxiliaire, de médiateur lui provoquera malheureusement

un sentiment d’éloignement"


"Il semble qu’Izambard a raison de reprocher à son ancien élève d’être « sans-cœur »"


"Allons, chapeau, capote, les deux poings dans les poches et sortons."


"et aussi de l’intelligence d’un esprit vif, qui vole d’une idée à une autre"


"J’ai tenu ma promesse [...] Je suis resté », mais quelque lignes plus tard :
« je resterai. Je n’ai pas promis cela »."


"Errant une quinzaine de jours, courant les librairies et les salles de rédaction,
couchant dans des péniches de charbon amarrées le long des quais,

n’ayant rien à faire

dans cette ville abrutie par la hantise de la faim, où les gens ne font que parler de victuailles.

Devant un Paris décevant, ce jeune se sent condamné, comme il l’écrit dans la
lettre adressée Paul Demeny le 17 avril 1871,

« Ne sachant rien de ce qu’il faut savoir, résolu à ne faire rien de ce qu’il faut faire,

je suis condamné, dès toujours, pour jamais."


"Le ton général de cette lettre est morose et amer. Sa mauvaise humeur ne se cache
non plus dans la lettre à Izambard un mois plus tard, le 13 mai 1871, où se présente

un Rimbaud plus agressif, cynique, arrogant, et ingrat

envers le sauveur de Mazas. Est-elle écrite dans une grande tension, comme
l’indique Lefrère, « dans l’adresse, Rimbaud se trompe à la fois sur l’orthographe
du nom de son correspondant et sur la rue où il habit »?

Ou s’agit-il plutôt de la crise printanière attaquant Rimbaud de façon régulière"


"Les « illusions » aux yeux de son ancien professeur se transforment chez
« cet avatar » en Illuminations, où se présentent le maniement inédit du montage

prosaïque discontinu, le fragment hétérogène, le kaléidoscopique ultrarapide,

qui annoncent que « la poésie doit mener quelque part"


"Je commençai à soupçonner obscurément qu’une relation de cause à effet
devait exister entre cette tyrannie domestique et

le dualisme cérébral

constaté par moi tant de fois. Le Rimbaud du collège,

hermétique et réticent,

paraissait, même là, se sentir encore sous la poigne de fer qui le matait ;
tout autre était le Rimbaud de nos entretiens,

épanouissant son moi dans une sorte de liesse intellectuelle.

Cette persévérance de l’action occulte, je ne l’ai bien compris qu’après coup,
quand la psychologie, devenue plus pénétrante, nous a pourvus d’un langage
adéquat à ses nouvelles observations. Rimbaud, lui aussi, a pris conscience
plus tard

de ce dédoublement de sa personnalité :

« Je est un autre », m’écrivait-il."



"Izambard constate à juste titre que chez le Rimbaud du collège, la présence
si envahissante, si proche, si insupportable de sa mère lui provoque la révolte
si grave qu’elle pourrait bien modifier la trajectoire de sa vie.

Le fils devient sa mère en négatif prenant chacun de ses principes à contrepied :

Vitalie est bonapartiste, il s’affiche sympathisant de la Commune ;

Vitalie est chaste et vertueuse, il se prétend tous les vices ;

Vitalie croit en la valeur de la discrétion, il est provoquant, choquant en paroles
et en actes ;

Vitalie est sobre, il boit et fume plus qu’il ne convient ;

Vitalie est croyante, voire un peu bigote, il est anticlérical.

Chaque nouvel affrontement avec sa mère lui fait éprouver douloureusement
le manque d’amour, « comme un véritable attentat métaphysique que Rimbaud
enfant a subi », comme l’écrit Yves Bonnefoy."


"Au caractère crapuleux et cynique de la confession faite à son ancien professeur,"


"L'orgueilleux autodidacte

ne nous demanderait pas notre opinion, ou bouffonnerait en l’écoutant ;
[...] car alors « le poète est vraiment voleur de feu »."


"Il nous paraît que l’évocation de L’Ecclésiaste n’est pas une simple parodie
du Livre Saint, mai une révélation du cœur de Rimbaud au printemps 1871.
C’est ce que nous lisons dans le verset 11 du chapitre II :

« Je me suis tourné vers toutes les œuvres qu’avaient faites mes mains et
vers le travail auquel j’avais travaillé pour les faire et voici :

tout est vanité et poursuite de vent ».

 Rappelons également que dans la lettre à Demeny le 17 avril 1871, Rimbaud,
opposant sa situation à celle de son correspondant qui vient de se marier,
ne ressent que la dépression.

« Quel profit y a-t-il pour l’homme en tout son travail auquel il travaille sous le soleil ? »,

peut-être avec L’Ecclésiaste sous ses yeux,

Rimbaud se demande pareillement.  D’ailleurs, « toutes ces œuvres » évoquées
dans ce verset font penser à celles de Rimbaud – le Recueil de Douai, composé
de 22 poèmes. Quand il retourne vers son travail, Rimbaud demande à Demeny,
dans la lettre du 10 juin 1871, de le détruire :

« brûlez, je le veux, et je crois que vous respecterez ma volonté comme celle
d’un mort, brûlez tous les vers que je fus assez sot pour vous donner lors de
mon séjour à Douai ».

Tout est vanité et poursuite de vent."


"Selon Claude Jeancolas, la citation n’est pas extraite de l’Ecclésiaste,
c’est du Rimbaud pur, elle est une preuve que

le collégien a intégré toutes les techniques bibliques de l’écriture

qui portent le lecteur à la réflexion, à l’éternel, aux interprétations multiples."


"Travailler maintenant, jamais, jamais ; je suis en grève."
"Cependant, juste avant la déclaration de son intention de faire grève, Rimbaud écrit:
"Je serai un travailleur : c’est l’idée qui me retient"

[Nota mía: Rimbaud dice cualquier cosa sin coherencia;
como si pensase a cada instante diferente. ¿O su
pensamiento solo responde al momento? Sus ideas
van a la deriva al igual que su marcha, sin sentido,
solo respondiendo a la necesidad del momento,
al igual que las palabras de sus versos que vienen
llamándose unas a otras.]







XIANG Zheng

Doctorat Langue et Littérature Françaises

La poésie française moderne (Baudelaire, Rimbaud, Lautréamont)  et son
influence sur la nouvelle poésie chinoise dans les années 1920-1930.

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